Balades en expertise comptable :
L’égalité femme homme les quotas dans les grandes entreprises

Révision Droit août 2022

L’égalité femme homme les quotas dans les grandes entreprises... Décryptés par Martine Mariage et Jean-François Bocquillon, professeur en classes préparatoires à l’expertise comptable et coauteurs des manuels DCG 1 à 3 « Expert Sup » Dunod.

#Quotas #LoiCopé-Zimmermann #LoiPACTE

L’égalité femme homme les quotas dans les grandes entreprises

Le recours aux quotas a ses partisans et ses détracteurs. Il présente l’avantage d’agir sur les comportements.

La loi Copé-Zimmermann du 27 janvier 2011 a assigné des objectifs de parité aux conseils d’administration et de surveillance des sociétés cotées et des grandes sociétés. Ces dernières sont des sociétés non cotées employant plus de 500 salariés (250 depuis le 1er janvier 2020) et présentant un chiffre d’affaires ou un bilan d’au moins 50 millions d’euros.
Dans ces entreprises, la proportion d’administrateurs de chaque sexe devait être de 20 % en 2014 et de 40 % depuis 2017.

La loi PACTE de 2019 a d’ailleurs renforcé les sanctions. Ainsi toute délibération des conseils (Conseil d’administration ou conseil de surveillance) ne respectant pas les obligations de parité est nulle.

L’ambition de la loi repose sur la conviction forte que l’ouverture des conseils – incarnation, par excellence, du lieu de décision au sein de l’entreprise – mettra en lumière les inégalités qui touchent les femmes actives en général.
En brisant le « plafond de verre », ces femmes joueront un rôle moteur et entraîneront, dans leur sillage, toutes les autres.

Le succès de la loi Copé-Zimmermann est très net concernant les grandes entreprises cotées. Le pourcentage de femmes dans les conseils d’administration et de surveillance est passé de 10 % en 2009 à 46 % en 2021 dans les entreprises du SBF 120 (40 valeurs du CAC 40 et 80 valeurs parmi les 200 premières capitalisations boursières françaises). (1) 

Mais la performance française en termes de mixité dans les conseils d’administration et de surveillance n’a, malheureusement, pas enclenché la dynamique paritaire dans les instances de direction qu’il était permis d’espérer.

Dix ans après la promulgation de la loi Copé-Zimmermann, les femmes ne représentent que 22,4 % des membres des comités exécutifs et de direction des entreprises cotées.

Au-delà de la promotion des femmes aux postes à responsabilité, il s’agit bien d’assurer une plus grande mixité au sein de ces fonctions.

Face à l’insuccès des dispositions législatives existantes à insuffler cette dynamique paritaire, un nouvel arsenal juridique a semblé incontournable pour favoriser l’accession des femmes aux postes stratégiques. Tel est le cas de la loi dite Rixain de 2021. (2)

La loi Rixain, a instauré un nouvel indicateur afin d’établir un état des lieux de la situation des femmes au sein des postes à forte responsabilité dans les entreprises d’au moins 1000 salariés.

Ces entreprises devront publier chaque année les écarts éventuels de représentation de chaque sexe parmi les cadres dirigeants ET les membres de leurs instances dirigeantes.

Elles devront veiller à assurer une répartition équilibrée par genre entre ces mêmes personnes.

Le statut de cadre dirigeant est défini à partir de 4 critères additifs (article L. 3111-2 du Code du travail) (3)

  • Il a des responsabilités ;
  • Il a une grande indépendance dans l’organisation de son emploi du temps ;
  • Il prend des décisions de façon largement autonome ;
  • Sa rémunération est parmi les plus élevées de l’entreprise.

Une instance dirigeante est qualifiée par deux critères additifs (art L. 23-12-1 du Code de commerce) (4)

  • Cette instance est mise en place dans une société,
  • Elle assiste régulièrement les organes chargés de la direction générale dans l’exercice de leur mission. 

La loi a fixé des quotas par genre pour les postes de cadres dirigeants et les membres des instances dirigeantes.

Par conséquent la proportion de personnes de chaque sexe au sein de chacune de ces catégories ne pourra pas être inférieure à 30% au 1er mars 2026 et 40 % au 1er mars 2029, sous peine de sanctions financières (au maximum 1 % de la masse salariale).

A titre d’illustration, selon l’index de mars 2022, 5 entreprises sur 100 de plus de 1000 salariés ont au moins 2 femmes parmi les plus fortes rémunérations.

Au-delà de cet aspect quantitatif, il faut souligner l’apport qualitatif de cet arsenal juridique car l’accession des femmes aux conseils d’administration et de surveillance a engendré un profond renouvellement de ces instances, désormais plus jeunes et plus internationalisées.

Le récent rapport du Haut Conseil à l’égalité entre les femmes et les hommes (5) souligne que « trois comportements sont observés chez les nouvelles administratrices : leur assiduité aux réunions, leur volonté de comprendre les enjeux (elles posent plus de questions que leurs homologues masculins) et leurs compétences en matière stratégique et financière. Contrairement aux idées reçues, les administratrices apportent non seulement de la diversité, mais aussi de l’expertise au sein des conseils » 

(1) 8ème palmarès de la féminisation des instances dirigeantes des entreprises du SBF120, 25/10/2021
https://www.egalite-femmes-hommes.gouv.fr/cp-resultats-de-la-8eme-edition-du-palmares-de-la-feminisation-des-instances-dirigeantes-des-entreprises-du-sbf120-25-10-2021/
(2) LOI n° 2021-1774 du 24 décembre 2021 visant à accélérer l’égalité économique et professionnelle
https://www.legifrance.gouv.fr/loda/id/LEGIARTI000044565408/2021-12-27/
(3) Définition de cadre dirigeant : article L. 3111-2 du Code du Travail
« Sont considérés comme ayant la qualité de cadre dirigeant les cadres auxquels sont confiées des responsabilités dont l’importance implique une grande indépendance dans l’organisation de leur emploi du temps, qui sont habilités à prendre des décisions de façon largement autonome et qui perçoivent une rémunération se situant dans les niveaux les plus élevés des systèmes de rémunération pratiqués dans leur entreprise ou établissement ».
(4) Définition d’instance dirigeante : art L 23-12-1 du Code de commerce :
« Est considérée comme instance dirigeante toute instance mise en place au sein de la société, par tout acte ou toute pratique sociétaire, aux fins d’assister régulièrement les organes chargés de la direction générale dans l’exercice de leurs missions. »
(5) Haut conseil à l’égalité entre les femmes et les hommes https://www.haut-conseil-egalite.gouv.fr/