Balades en expertise comptable :
La concurrence...

Actu Économie septembre 2023

Décrypté par Audrey Meyer, professeur en classes préparatoires à l’expertise comptable, coauteur du manuel DCG 9 et du « Expert DCG 1re année », ouvrage complet de préparation à l’épreuve.

#DGCCRF #Loi de l’offre et de la demande

La concurrence

En juin 2023, la DGCCRF (Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes) a infligé une amende de 237 600€ à deux sociétés du secteur de maintenance des réseaux électriques pour pratiques d’ententes illicites dans le cadre d’un appel d’offres lancé par le Syndicat d’Energie de l’Orne. Plus précisément, ces deux sociétés échangeaient leurs offres de prix et des informations sur leurs mémoires techniques, faussant le jeu de la concurrence en trompant l’acheteur public sur la réalité et l’étendue de la concurrence sur le marché. De telles pratiques peuvent avoir pour effet de renchérir les coûts des travaux pour la collectivité et les contribuables.

En France, la DGCCRF [Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes]) et l’Autorité de la Concurrence sont garants d’une concurrence effective, équitable, et profitable aux consommateurs.

Mais en quoi consiste la concurrence ?

La concurrence désigne à la fois :

  • une situation (c’est-à-dire une structure de marché concurrentielle, avec une multitude d’offreurs).
  • et une dynamique (soit une compétition entre les entreprises qui mettent en œuvre des stratégies concurrentielles dans la conquête de parts de marché).

Pour analyser les bienfaits théoriques de la concurrence, les économistes s’appuient sur le cadre normatif de la concurrence pure et parfaite. Un marché en situation de concurrence pure et parfaite (CPP), marché idéal pour les économistes néo-classiques, remplit cinq conditions :

    • sur ce marché, il doit tout d’abord exister une multitude d’offreurs et de demandeurs de taille comparable, de telle sorte qu’aucun d’entre eux ne puisse influencer le prix du bien. C’est la condition d’atomicité.
    • ce marché doit par ailleurs être fluide de manière à ce qu’il y ait une libre entrée et une libre sortie du marché,
    • les produits disponibles sur le marché doivent être en outre parfaitement homogènes, standardisés.
    • le marché de CPP doit être transparent : les offreurs et les demandeurs disposent d’une information parfaite et gratuite sur les conditions du marché et notamment sur les prix des biens.
    • enfin, les facteurs (travail et capital) doivent pouvoir, à tout moment, se déplacer du marché d’un bien à celui d’un autre bien.

En situation de CPP, le prix d’équilibre du marché, déterminé par la « loi de l’offre et de la demande », est alors unique et s’impose à tous les offreurs et à tous les demandeurs.

Toutefois, les marchés réels s’écartent pour l’essentiel du cadre d’analyse idéal de la CPP, laissant place à une concurrence imparfaite :

  • Ainsi des entreprises cherchent à se concentrer ou à exercer un pouvoir de marché pour maximiser leur profit.
  • Des entreprises érigent par ailleurs des barrières pour rendre difficile l’entrée ou la sortie sur le marché, ces barrières pouvant par exemple prendre la forme de brevets, de technologies spécifiques, de conditions financières avantageuses.
  • Les entreprises adoptent en outre des stratégies de différenciation des produits afin de capter les consommateurs au travers par exemple de la publicité, des marques, des séries limitées, …
  • Les entreprises cherchent à créer des situations d’asymétries d’information vis-à-vis des concurrents et des clients…
  • Enfin, le capital et le travail ne sont pas parfaitement mobiles, d’un point de vue sectoriel et géographique.

Plus globalement, l’existence de la concurrence n’est pas conditionnée au respect de l’ensemble des conditions de concurrence pure et parfaite. La théorie des marchés contestables conduit ainsi à considérer que l’intensité concurrentielle d’un marché n’est pas fonction du nombre de concurrents effectifs mais dépend du nombre de concurrents potentiels. En d’autres termes, sur un marché contestable, même s’il y a peu d’offreurs, voire un seul offreur, ceux-ci peuvent être amenés à se comporter comme en situation de concurrence pure et parfaite pour échapper à la menace des concurrents potentiels.

Mais au-delà de la relativisation du modèle de la concurrence pure et parfaite, quels sont les bienfaits potentiels de la concurrence défendus par les partisans de la libéralisation ? Ces bienfaits ne peuvent-ils pas être relativisés ?

  • Le premier bienfait potentiel de la concurrence est la pression à la baisse des prix : la concurrence permet ainsi de tirer les prix vers le bas, participant à maximiser la satisfaction du consommateur.
    # Mais inversement, en cas de faible concurrence, l’accroissement de la taille des entreprises peut favoriser les économies d’échelle, soit la répartition des coûts fixes sur un volume de production élevé, rendant les coûts moyens (et donc potentiellement les prix) décroissants.
     
  • On peut par ailleurs penser qu’en cas de forte concurrence, les entreprises sont incitées à se différencier par exemple en innovant ou en améliorant la qualité de leurs produits afin d’attirer plus de consommateurs.
    # Cependant, une différenciation peut donner lieu à des marchés monopolistiques ou oligopolistiques où les entreprises, en faible nombre, ont un pouvoir de marché. Elles peuvent alors en profiter pour augmenter leurs prix, baissant la satisfaction, soit le surplus du consommateur. Par ailleurs, la concurrence entre les entreprises peut les conduire à négliger la qualité de leurs produits ou à réduire le cycle de vie de leur produit par exemple au travers de l’obsolescence programmée. Enfin, les projets innovants de grande envergure peuvent être financés uniquement par des entreprises de grande taille, qui font des profits conséquents (et plus difficilement dans une structure de marché atomistique composée de nombreuses entreprises de petite taille).
    Les enjeux de la concurrence sont en conséquence complexes et sont à apprécier en fonction du marché considéré. Ces enjeux sont à considérer dans une perspective dynamique, au regard du critère d’efficacité économique mais aussi des critères de justice sociale et de responsabilité environnementale.

Éléments complémentaires

- Lien avec le programme du DCG :

UE du DCG

Lien avec les savoirs du programme

Compétence associée

UE5 « Economie »

 

- La notion de concurrence : cadre normatif de la concurrence pure et parfaite, réalité de la compétition entre entreprises (Walras, Pareto, Baumol)

- Les caractéristiques de l’équilibre de marché dans un cadre concurrentiel.

- Analyse dynamique de la concurrence (Schumpeter, Hayek).

- Caractériser les différentes formes de concurrence.
- Mettre en évidence les mécanismes de formation des prix.

- Identifier le rôle des prix dans le comportement des agents et l’allocation des ressources.

- Étudier les bienfaits attendus et les limites de la concurrence sur un marché.

- Fonctionnement des marchés et comportement des acteurs en concurrence imparfaite.

- Régulation de la concurrence dans le cadre national et européen.

- Repérer les différentes structures de marché de concurrence imparfaite.

- Analyser les comportements des acteurs et leurs répercussions sur l’équilibre d’un marché déterminé en concurrence imparfaite.

- Identifier les organes chargés de la régulation de la concurrence et les mesures contribuant au maintien de la concurrence.

UE7 « Management »

- Démarche stratégique. 
- Avantage concurrentiel.

- Identifier la (les) source (s) d’avantage concurrentiel d’une entreprise.

- Identifier, analyser et justifier la démarche stratégique suivie par une organisation.

- Expliquer l’évolution stratégique d’une organisation donnée.


Pour aller plus loin :