Balades en expertise comptable :
La société en formation après les arrêts du 29 novembre 2023...
Actu Droit juin 2024
Décryptée par Martine Mariage et Jean-François Bocquillon, professeur en classes préparatoires à l’expertise comptable et coauteurs des manuels DCG 1 à 3 « Expert Sup » Dunod.
#Paiement #Jurisprudence #ResponsabilitéDesAssociés #IntentionCommune
La société en formation après les arrêts du 29 novembre 2023
Le paiement des actes passés en période de formation
L’article L. 210-6 du Code de commerce pose que « les sociétés commerciales jouissent de la personnalité morale à dater de leur immatriculation au RCS ».
Toutefois, le même article ajoute : « Les personnes qui ont agi au nom ou pour le compte d’une société en formation avant qu’elle ait acquis la personnalité morale sont tenues des actes accomplis ».
Avant les arrêts du 29 novembre 2023, la Cour de cassation considérait que l’acte, non expressément souscrit au nom ou pour le compte d’une société en formation, était nul. Elle ajoutait que ni la société, ni la personne ayant entendu agir pour son compte n’avait à répondre de son exécution. Cette jurisprudence créait de l‘insécurité juridique pour les créanciers et portait atteinte à l’un des piliers du droit de toute économie libérale : le contrat.
La responsabilité des associés avec la jurisprudence de 2023
Dans sa jurisprudence de 2023 la chambre commerciale de la Cour de cassation considère que « l’exigence selon laquelle l’acte doit, expressément et à peine de nullité, mentionner qu’il est passé au nom ou pour le compte de la société en formation ne résulte pas explicitement des textes régissant le sort des actes passés au cours de la période de formation ».
La Haute Cour pose qu’il appartient au juge d’apprécier souverainement « si la commune intention des parties n’était pas que l’acte fût conclu au nom ou pour le compte de la société en formation ».
Le nouveau rôle du juge
Dans ces arrêts de novembre 2023 la Cour fournit un guide tant pour le juge que pour les parties. Elle pose qu’il est désormais « possible et souhaitable de reconnaître … au juge le pouvoir d’apprécier souverainement, par un examen de l’ensemble des circonstances tant intrinsèques à l’acte qu’extrinsèques, la commune intention des parties ».
La tâche de rechercher la commune intention incombe au juge du fond, premier et second degré.
L’analyse des circonstances de la conclusion du contrat
Ces circonstances sont intrinsèques ou extrinsèques. Par circonstances intrinsèques, il faut entendre la manière dont l’acte a été rédigé.
La recherche des circonstances extrinsèques amène les juges à idetifier tout ce qui pourrait, en dehors de l’acte, permettre de déceler l’intention des parties. Par exemple des documents que ces personnes auraient pu échanger.
Les conséquences de l’intention commune
L’article L. 210-6 du Code de commerce dispose que les personnes qui ont agi pour le compte d’une société avant qu’elle ait acquis la personnalité morale sont responsables indéfiniment et solidairement. En conséquence, si l’intention commune des créateurs est démontrée, les créanciers pourront se retourner contre l’un quelconque des associés, à charge pour celui qui paie d’intenter une action contre les autres associés.
Bibliographie
Les arrêts rendus par la chambre commerciale le 29 novembre 2023
Cass.com 29/11/2023, n° 22-12.865 : https://www.courdecassation.fr/decision/6566e2b618106f8318ba9e76
Cass. Com 29/11/2023, n° 22-21.623 : https://www.courdecassation.fr/decision/6566e2b818106f8318ba9e78
Cass.com 29/11/2023, n° 22-18.295 :
https://www.courdecassation.fr/decision/6566e2bb18106f8318ba9e7a
Actes accomplis pour le compte d’une société en formation : les conditions de la reprise
Etude Inforeg ; Cahier de droit de l’entreprise, n° 2, mars-avril 2024, prat 8
Société en formation : enfin le formalisme recule !
B Dondero, La semaine juridique entreprise et affaires, n° 50, 14 décembre 2023, 1365